A la découverte du Mouvement Personne D’Abord asbl


 Avec le soutien financier de l’AViQ dans le cadre des initiatives spécifiques.


Le Mouvement Personne D’Abord est une association de personnes qui présentent une déficience intellectuelle, qui sont autoreprésentantes et qui défendent leurs droits elles-mêmes. L’association vise l’intégration et l’autonomie de celui ou celle qui veut être reconnu comme un citoyen à part entière.

Le Mouvement Personne D’Abord est géré par les membres actifs qui présentent une déficience intellectuelle. Ils sont aidés pour cela par des membres de soutien qui sont bénévoles au Mouvement Personne D’Abord et des personnes ressources qui sont des professionnelles de l’action sociale.

Des membres des trois antennes (Verviers, Liège, Namur) font partie du conseil de gouvernance et prennent les décisions avec le conseil d’administration. « L’association nous appartient. Les personnes ressources sont nos employées ».

Le conseil de gouvernance du Mouvement Personne D’Abord.

Au Mouvement Personne D’Abord, chacun peut s’exprimer librement afin de parler de ses projets, de ses envies, de ses besoins. Prendre ses propres décisions, trouver des solutions à ses problèmes.

Etre une Personne D’Abord, c’est apprendre à défendre ses droits, à se faire respecter, à être reconnu comme un citoyen à part entière. « Nous apprenons à développer notre autonomie, à penser par nous-mêmes, à faire nos propres choix. »

Nous avons des groupes de paroles dans chaque antenne. Nous nous réunissons une fois par semaine dans chaque antenne. Nous défendons des thèmes comme la famille, la vie en autonomie, l’emploi, la formation, le logement, la santé, la vie affective et sexuelle, la parentalité. Nous organisons des formations sur différents sujets qui nous préoccupent. Nous participons à des formations pour nous former. Nous donnons des sensibilisations. Nous produisons des textes, des revues pour sensibiliser les travailleurs sociaux, les parents, les citoyens. Nous participons au Réseau Wallon de Lutte contre la Pauvreté. Nous remarquons que beaucoup d’entre nous vivent dans une grande précarité. Nous sommes administrateurs du Portail de Référence pour l’Enfant à Besoins Spécifiques. Nous participons aux commissions AVIQ, aux conseils communaux de la personne en situation de handicap, au Collectif 03/12 à Liège et au Collectif Mobilité Liège-Verviers.

Pour développer ces compétences, nous organisons aussi des ateliers :  artistique, lire-écrire-calculer, un potager solidaire, mamie-marmite.  Des ateliers culturels sont proposés ainsi que des moments de détente.

Pour fonctionner, nous avons besoin d’argent. Pour cela, nous participons à une brocante le lundi de Pâques à Verviers où nous vendons des livres. Nous organisons des concerts. Nous vendons des calendriers chaque année. C’est nous qui prenons tout cela en main pour que notre association vive. Si notre association vit, nous pouvons y développer notre citoyenneté.  Tout ce que nous réalisons, nous permet d’apprendre à nous autodéterminer pour pouvoir efficacement nous autoreprésenter.

Le Mouvement Personne D’Abord en témoignages

Visite culturelle de la ville de Verviers.

Le Mouvement Personne D’Abord est un lieu d’expression et de liberté.

Voilà ce qu’il nous apporte :

Le Mouvement m’a appris à faire respecter mes droits et à défendre les droits des autres. Le Mouvement m’a appris à me voir autrement et à ne pas dépendre des autres. Grâce à ça, je prends mes responsabilités et je suis Président du Mouvement depuis 2012.

Xavier.

 

Connaitre le Mouvement m’a appris à être plus autonome et à avoir confiance en moi. Ça m’a permis de construire mes projets, de montrer mes compétences, tout en acceptant ma déficience intellectuelle. Je suis une Personne D’Abord.

Vanessa.

 

Je peux partager des activités, m’engager dans des combats qui me tiennent à cœur et être une citoyenne.

Solène.

 

Ça me permet de faire de nouvelles rencontres, de s’entraider et de se soutenir.

Martine.

 

Je peux demander de l’aide quand j’ai besoin. C’est aussi faire des sensibilisations avec les étudiants pour les faire réfléchir. C’est rencontrer les politiques. C’est participer à des réunions et à des formations à l’extérieur. C’est aussi apprendre à défendre mes droits et dire ce que je veux dans ma vie.

Didier.

 

J’ai appris à faire des choses sans devoir me justifier.

François.

 

Ça me permet de vider mon sac, de découvrir qui je suis vraiment.

Marthe.

Le Mouvement Personne D’Abord vu…

  • Par Jean-Jacques Detraux, Professeur Emérite, département de Psychologie de l’Université de Liège : Cognition et Comportement Faculté de Psychologie, de Logopédie et des Sciences de l’Education

Quelle est l’importance de l’autoreprésentation et de l’autodétermination pour des personnes qui présentent une déficience intellectuelle ?

L’autodétermination conduit toute personne à éprouver une bonne estime de soi, de se sentir appartenir à une communauté humaine et d’être relié aux autres êtres humains. Ceux-ci ont des besoins physiologiques et psychologiques et ces besoins doivent être rencontrés et satisfaits pour que les personnes éprouvent un bien-être. Au-delà de besoins de base (se nourrir, se loger,..), toute personne doit pouvoir s’accepter et faire partie de réseaux sociaux pour arriver à faire face aux divers obstacles rencontrés dans la vie ainsi qu’à la complexité des situations. L’autodétermination est en lien avec la motivation de la personne à s’affirmer et à se prendre en charge par elle-même. Elle conduit la personne à avoir un contrôle de sa vie le plus large possible et à décider elle-même quelles sont les liens d’interdépendance dans lesquels elle souhaite s’engager.
L’autodétermination est aussi et surtout un droit affirmé par diverses conventions et traités internationaux.

Les personnes avec une déficience intellectuelle éprouvent, de manière objective, un certain nombre de difficultés à s’adapter aux diverses situations sociales et à s’affirmer comme personne reconnue à part entière. Cela tient à de nombreux facteurs dont des facteurs personnels (lenteur dans les apprentissages, difficultés spécifiques liées à la compréhension des situations par exemple) et des facteurs environnementaux (préjugés sur les capacités des personnes, discriminations diverses, complexité des situations sociales, accent mis sur les performances à réaliser dans un temps limité, etc.). Pour que les personnes avec déficience intellectuelle puissent, comme tout un chacun, avoir la possibilité de se réaliser, d’avoir une bonne connaissance et une bonne estime de soi, de disposer d’un jugement critique permettant de faire les bons choix, de valoriser leurs compétences propres, il nous faut proposer des programmes d’apprentissage ambitieux, bien structurés et évalués, se déroulant dans des milieux inclusifs. Il nous faut aussi créer des opportunités pour faire des apprentissages en situation habituelle de vie.
Réfléchir sur les stratégies menant à l’autodétermination des personnes avec déficience intellectuelle est donc un enjeu majeur de notre système éducatif et de formation d’une part, et de la manière dont nous organisons les relations sociales d’autre part. Le concept d’autodétermination tel qu’il a été proposé par plusieurs auteurs, permet de (re)placer la personne comme acteur à part entière de sa vie et pas seulement comme une personne forcément dépendante de son entourage car jugée incapable.

L’autoreprésentation bouleverse notre rapport au monde “du handicap” en nous obligeant non pas de décider à la place des personnes mais bien en dialogue avec elles (Rien sur nous sans nous !). Les personnes doivent avoir l’occasion d’exprimer leur point de vue et ce, dans des conditions adaptées en regard de leurs caractéristiques propres de fonctionnement intellectuel, langagier, moteur. Le fait que des personnes avec déficience intellectuelle prennent d’initiative la parole dans diverses manifestations (colloque, forum, séminaire, réunion de commission, de conseil d’administration, etc.) contribuent à un changement (lent!) des mentalités car ces situations dans lesquelles les personnes s’expriment changent le regard que la personne tout venant peut avoir sur la déficience intellectuelle : cette étiquette disparaît peu à peu pour faire naître une rencontre avec une personne, avec ses propres caractéristiques et avec ses compétences.
Bien plus, le fait que la personne avec déficience intellectuelle exerce effectivement sa citoyenneté dans diverses situations sociales permet de prendre conscience de formes très subtiles de discrimination. En effet les discriminations ne sont pas seulement des actes de rejet manifeste, d’injures ou d’agressions mais elles sont aussi des pratiques plus “invisibles” comme prendre la parole à la place de la personne, penser et décider pour elle, faire semblant de l’écouter ou la considérer a priori comme incapable.
L’autoreprésentation est le résultat d’un apprentissage mais aussi d’un combat au quotidien. C’est aussi et avant tout un droit fondamental de la personne. Rappelons d’ailleurs que l’autoreprésentation est une émanation directe de la manière de concevoir la démocratie dans la Grèce antique (E. Gardien, sociologue). Il s’agit donc de connaître ce droit mais aussi de le revendiquer.

Les deux concepts sont bien entendu liés : plus la personne se sentira autodéterminée, confiante dans ses capacités, avec une bonne estime de soi et une solide motivation, plus elle voudra et pourra exercer son droit à la parole tout en prenant en considération le point de vue d’autrui mais en défendant le sien propre.

  • Par Danielle Tychon, personne ressource animatrice-coordinatrice au Mouvement Personne D’Abord

Quel est le rôle d’une personne ressource ?

« C’est un enseignant, un organisateur. Enfin et surtout, une personne qui apporte son soutien.
Elle doit fournir un support continu pour aider le groupe à atteindre les buts et les objectifs qu’il s’est fixé. C’est-à-dire, aider les membres à prendre des décisions bien pensées qu’ils pourront mener à bien. Elle doit montrer aux membres comment prendre des décisions, résoudre des problèmes et faire preuve d’initiatives. Elle doit s’engager à donner du pouvoir aux membres.
La personne ressource aide à l’organisation démocratique du groupe. Le principe dans toutes ces démarches est de donner la possibilité à la personne de progresser à son rythme ».
Bill Worrel

  • Par Sophie Lambert, Echevine de la Santé, des Affaires sociales, de la Lutte contre la Pauvreté et de l’Egalité des Chances à Verviers (2018 à aujourd’hui) et André Schroyen, Echevin de l’Environnement et de la Vie sociale de la Ville de Liège (2012-2018).

Que pensez-vous de la participation citoyenne des personnes qui présentent une déficience intellectuelle ?

Par Sophie Lambert :

Je pense réellement qu’en tant que citoyenne, vous avez toute la légitimité à participer à un conseil consultatif.

Le Mouvement Personne D’Abord est une association active au sein du Conseil Consultatif Communal des Personnes en situation de handicap. Par exemple, vous avez souligné l’importance des pictogrammes et de la lisibilité dans le cadre des élections communales et provinciales. La Ville de Verviers a donc amélioré la signalisation et continuera de le faire pour les prochaines élections. Cela sert le Mouvement Personne D’Abord mais aussi beaucoup d’autres citoyens.

Par André Schroyen :

Dans tous les domaines, il faut être attentif à la personne plus fragile ou porteuse de handicap. C’est évident que c’est extrêmement important que l’autoreprésentation soit la plus forte possible. Qui peut mieux parler des problématiques que vous rencontrez ? C’est vous ! L’essentiel, c’est vous. C’est vraiment la personne qui exprime ses besoins. Le facilitateur, la personne ressource, soutient la personne sans dire les choses à sa place. Elle vous aide à vous autoreprésenter.

Coordonnées du Mouvement : 087/22.50.55 – 0495/51.74.46 et www.mouvementpersonnedabord.be

Vanessa Chapelle, Didier Walter, Loïc De Gottal, Xavier Lacroix, David Dalier, Solène Dodémont et Ben Boukarabila